Autant en arabe littéraire qu’en
dialectal, le champ sémantique du terme « Ekbess » connote un manque
à combler ( حفرة كبس), la pression (qu’on met par exemple sur un enfant pour
le discipliner), la compression (d’une bouteille dont on enfonce le bouchon),
mais aussi la peur qu’inspire un cauchemar, quelqu’un qui vous surprend ou qui
vous cerne (كبس عليه , كابوس,كبسو ), également
le fait de recouvrir sa tête pour se cacher
(l’accusé dans un tribunal par exemple) pour se protéger du froid ou pour
soigner une migraine (راسو . كبوس كبس ).
Le mot Ekbess évoque en somme une
force qui s’exerce dans le but de contraindre, de comprimer, de réprimer ou de
cacher, et la très technophile campagne du web #اكبس
#Ekbess ne change rien à l’impact idéologique négatif du terme.
Lancée le 15 août dernier, #Ekbess est censée donc serrer la vis au gouvernement, comme l’a fait 7ell
avec l’assemblée constituante concernant la transparence. Mais vu de plus près,
le message de Ekbess réfère à un discours clos et
totalitaire peu propice à la diffusion des idées de la transition
démocratique.
Déjà, il s’avère qu’elle est portée par une tendance unique proche d’Ennahdha, comme le démontre l’enrôlement
de propagandistes tel que Houcem Eddine Trabelsi, admin d’une page Facebook (أنا خوانجي ، إيه نعمأنا خوانجي) et responsable de l’information électronique au ministère des
Droits de l’Homme. Emblématique de l'investissement d’Ennahdha sur les réseaux
sociaux, le choix du hashtag #Ekbess ne fait en fait que
confirmer l’homogénéité idéologique du mouvement.
Est-il étonnant d’ailleurs que cette
initiative soit reçue positivement par Samir Dilou, ministre des droits de
l’homme, (Sur Al-Jazira le 18 août dernier), que n'émeut guère la marche du kram vers
le palais présidentiel, organisée par les "conseils locaux de protection
de la révolution" (le jeudi 16 août) .
Tout récemment, sur Shems fm, Mossaab
Ben Ammar, porte-parole de la campagne Ekbess, déclarait, quant à lui, que
« le gouvernement a fauté en nommant des RCDistes à la tête des grandes
institutions de l'Etat » et qu’il fallait assainir les secteurs de l’Etat
et juger les corrompus, allant même jusqu’à demander la
démission de certains ministres.
Il ne manque pas, cependant, de préciser que « Ekbess et l'opposition n'ont pas les mêmes revendications ». Une rengaine qui fait encore écho aux arguments et aux représailles du parti au pouvoir, comme celle de Lotfi Zitoun, conseiller du chef du gouvernement, à propos de "la liste noire" des journalistes.
Il ne manque pas, cependant, de préciser que « Ekbess et l'opposition n'ont pas les mêmes revendications ». Une rengaine qui fait encore écho aux arguments et aux représailles du parti au pouvoir, comme celle de Lotfi Zitoun, conseiller du chef du gouvernement, à propos de "la liste noire" des journalistes.
Au niveau
numérique, la campagne Ekbess n’est finalement qu’une parodie de Sayeb Saleh,
N’har 3la Ammar ou 7ell. Au niveau politique, ça laisse largement entrevoir les
failles et les remous qui traversent le Mouvement nahdhaoui. Certains disent
qu’un règlement de compte se profile entre l'aile dure de
Nahdha salafisante et l'aile dite "modérée", tombée celle-ci sous la charme
novembriste. Une manière de montrer à Jebali la porte de sortie après que sa
démission ait été annoncée comme imminente à l’issue du congrès du Parti bleu.
La manifestation de la Kasba de vendredi dernier, menée par ce même Lotfi Zitoun avec Habib Ellouze et Adel Almi, n'est qu'une preuve supplémentaire du paradoxe idéologique de cette campagne qui devrait s'intituler "Ekbess rouhek" (Discilpines toi, toi-même d'abord".
*Version longue de l'article paru sur Tekiano le 4/9/2012
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