samedi 12 septembre 2009

Petit cantique

25.

Comme il est proche le temps de la naine blanche
Ravisseuse des magnitudes épandant la lettre servile
Et le cantique imparfait en poussière de croyants
A l’ombre molestée le kandjar de la milice
Inversant le texte au kana de l’étranger

Extrait de "Chapelet"

Poéme pour Ahlem

18.
Sur l’avenue, à la table de l’Univers s’assied
La femme crue aux bras charnus
Détournant l’arc-en-ciel sur la ligne de crête
Elle traite
Des nuits fauves et de tous les vomito blanco
L’homme qui se lève et paye son café
Ne la rhabille point avant de s’en aller


Extrait de "Chapelet"

Mon poéme cache-misère

30.
Dans quel courage tremper l’ennemi en vérité
Dans cette ville de chaisiers sans remparts
Gardée par des mendiants odieux vautrés dans la fiente
Regards imbus s’enorgueillant de félonie
Nulle férocité pour juguler cette traîtrise comme jadis
Le râle des esclaves face aux fauves de l’arène
La rumeur du sacrifice les terrassant
De cette mort méticuleuse et annoncée.

Extrait de "Chapelet"

jeudi 10 septembre 2009

Et puis encore....

LE DROIT AU RETOUR AU PARADIS
"Si Dieu a puni Adam en le renvoyant de l’éternité vers le temps, la terre est exil et l’Histoire, tragédie … La tragédie est née d’une guerre familiale ente Abel et Caïn puis elle s’est muée en guerres civiles, régionales et mondiales qui dureront jusqu’à ce que les descendants de l’Histoire viennent à bout de l’Histoire. Et après ? Après l’Histoire ? Il semble que le droit de retour au paradis est bordé d’absurde et de secrets divins, et que l’unique chemin qui y prépare est celui du gouffre, jusqu’à nouvel ordre … jusqu’à la promulgation de l’amnistie divine."


Mahmoud Darwich, extrait de La trace du papillon

Mahmoud Darwish le bien-aimé

Comme je le disais à Joy, des retours de manivelle m'ont empêché de continuer à bloguer... Mais l'excuse ne tient plus quand il s'agit d'un poète dont la trace est un chemin que nous retrouvons à chaque détour et à chaque détournement.Voici donc encore cet hommage.
Quand Marcel Khalifa et le Trio Joubrane font l'éloge de l’ombre
Il est des mots comme le feu dans le foyer, comme les fleurs de l’amandier, comme le cri des mouettes blessées.
« Qui suis-je pour vous dire ce que je vous dis ? Je ne suis pas la pierre façonnée par l’eau pour que je devienne visage ni le roseau percé par le vent pour que je devienne flûte… Je suis le joueur de dés, je gagne ou je perds. Je suis votre pareil ou un peu moins… »

C’est à l’ombre de ces mots ardents que Marcel Khalifa et les frères Joubran ont rendu hommage, sur les scènes de Carthage et de Hammamet, à Mahmoud Darwish, grand poète disparu qui lègue à leur musique la force de « métamorphoser l'événement et de le porter jusqu'à sa présence lyrique ». Deux concerts d’émotion intense où l’absent plus que jamais présent a déployé son ombre majestueuse sur l’archipel des espaces otages où les noms se démesurent pour briser les silences.

« Je tends une main pour retenir mes membres éparpillés de tant de corps, assailli d'une terre, d'un ciel, d'une mer et d'une langue », disait encore le poète.

Si Mahmoud Darwish est l’autre nom de la terre, la musique de Marcel Khalifa et des frères Joubran est l’autre voix de Darwish. Voix qui ruisselle de l’eau inépuisable de la perte pour célébrer les instants d'effondrement et de clarté du corps-poème. Darwish disait que la poésie est d’abord musique et qu’elle "se lit autant par les yeux que par les oreilles", prolongeant l’acte de l’écriture dans les récitals qu’il a maintes fois partagé avec Marcel Khalifa et les frères Joubran. Ainsi, déroutant définitivement la traîtrise du «majaz» et la cruauté de l’oubli, aura-t-il confié son corps aux creux de mots oraculaires où nous venons habiter. Au-delà de la mort et de la perfidie de l’histoire, l’héritage de Darwish nous incite aujourd’hui au dépassement et au renouvellement sans lesquels nul engagement n’est possible. En juillet 2008, juste un mois avant sa mort, il affirmait encore vouloir être lu « comme un poète, pas comme une cause ». Et Marcel Khalifa et les Joubran ont bien entendu cette voix pour la porter vers une nécessaire modernité où la recherche sur l’instrument s’avère essentielle pour l’éclosion d’une musique aussi pertinente et aussi parlante que le verbe.

« J’aurais pu ne pas être moi, j’aurais pu ne pas être ici… », disait Darwish.

Mais il était Nous, il était là, il sera là toujours comme l’arbre des présences...