lundi 17 septembre 2012

Les Non-Alignés sont-ils des Indignés ?

    Brièvement évoqué, par les grands et les petits médias, le XVIe Sommet des pays non-alignés s’est clos, à Téhéran, à la fin du mois dernier. Aux côtés de 120 ministres, vingt neuf chefs d’État ou de gouvernement y étaient présents, dont celui de l’Égypte, qui n’avait plus de relations avec l’Iran depuis les fameux accords israélo-égyptiens en 1980. Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a lui aussi, malgré tout, fait le déplacement pour son rituel discours sur la paix. Il en ressort que l’Iran prendra pour trois ans la présidence du Mouvement.

    Pourquoi ce Mouvement, qui représente les 2/3 de la population mondiale, n’a-t-il pas de poids dans des regroupements comme le G20, encore moins face au Brics ou au Groupe de Shanghai?
Si l’idée de Tiers-monde n’a plus le même sens que du temps de Tito, Nasser et Nehru, initiateurs des Non-Alignés, l’hégémonie semble prendre, en revanche, de la valeur démocratique ajoutée, avec notamment l’entrée en lice du Qatar et de l’Arabie Saoudite aux côtés de l’Occident.
Le « nouvel ordre économique international », prôné, autrefois, par le groupe des 77 et porté aux Nations unies en 1973 par le président Boumediene, n’a pas eu lieu. En le supplantant, l’altermondialisme prouve aujourd’hui que, même si la dénomination a changé, les pays du sud peinent toujours à nourrir leurs damnés de la mer.

Exodus 2012

    Certes, on peut comprendre que certains n’aient retenu que l’incident survenu lorsque le président égyptien Morsi a qualifié le gouvernement d’Assad d’ « oppressif », provoquant le départ de la délégation syrienne. Mais ce que l’on ne comprend pas, c’est ce silence brutal face à cet autre terrible naufrage de Lampedusa. Le flux continu de milliers d’immigrants maghrébins vers l’Italie, la rive la plus proche de l’autre Méditerranée, n’est plus ce que l’Europe, occultant les mémoires, appelle une crise politique, mais bien une tragédie humaine qu’il faut désamorcer de toute urgence. 
  
   Aussi vieille que le monde civilisé, l’histoire de l’immigration et ses déchirures ne semblent point émouvoir outre mesure les gardiens des hautes frontières. Comme par exemple, « l’Exodus 1947, ce bateau qui transporta en 1947 des Juifs émigrant clandestinement d'Europe vers la Palestine, alors sous mandat britannique. La marine royale britannique s'empara du navire, et renvoya tous ses passagers dans la zone sous contrôle britannique en Allemagne. La dureté de la répression anglaise aura une grande influence sur la future reconnaissance de l'État d'Israël », peut-on aujourd’hui lire sur Wikipédia. Sauf que les exodes se font aussi à l’envers.
Rivés à leurs cieux, ni ceux-ci, ni ceux-là ne feront de prière pour les naufragés. Et pendant qu’Ahmadi Najad, le Guide suprême de la République islamique iranienne, annonçait que le monde est désormais « en mouvement vers un nouvel ordre international où le Mouvement des non-alignés peut et doit jouer un nouveau rôle », Rafik Abdessalem, notre ministre des Affaires étrangères, explique que « les principales forces politiques issues de la Révolution et des urnes seront toujours là dans les prochaines années ».
Des urnes contre la Révolution, le Ciel contre la Mer, des frontières contre le mouvement, on ne peut logiquement s’aligner sur un tel renversement du divin et de l’humain.


*Chronique hebdomadaire publiée dans "Courrier de Tunisie". 

Aucun commentaire: